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Algues vertes : l'Europe met les pieds dans le PLAV, silence !

Les nitrates, résidus de l'agriculture et de l'élevage intensifs représentent un danger pour la qualité des eaux. Ils favorisent entre autres le développement des algues vertes qui envahissent les côtes chaque été. Le PLAV, plan de lutte contre les algues vertes tarde à se mettre en place et l'Europe demande des comptes. Le gouvernement refuse de communiquer sur le sujet.

Des chiens, un cheval, des sangliers morts, des hommes intoxiqués, des algues vertes en quantité, des plages fermées. Ce n'est pas une surprise, on connaît depuis longtemps les conséquences d'une agriculture intensive mal maîtrisée. Des hommes de bonne volonté ont tiré les sonnettes d'alarme dès les années soixante. Ce n'étaient pas des passéistes, ils étaient agriculteurs, pêcheurs, chasseurs, chercheurs, agronomes, ils savaient de quoi ils parlaient. Mais pour rester sur leurs terres les agriculteurs devaient compléter leurs exploitations de polyculture élevage par des ateliers hors-sol. Rendements maximaux. On ne parlerait plus de fermes, ou d'entreprises agricoles désormais mais « d'exploitations » agricoles. Les banques étaient complaisantes, une surtout, Sainte-Hypothèque veillait sur elles. Dans les premiers temps, les agriculteurs allaient suivre les avis des techniciens appointés par les chambres d'agriculture, les centres de gestion, les coopératives, les producteurs d'engrais et de pesticides, pour plus de rendement, plus d'argent, plus de déchets aussi.
Le vivant - végétal ou animal - devenait « machine à produire », on sélectionnait avec brutalité, et nombre de races et variétes ont disparu, (ou presque) au nom du « progrès agricole ».
Maintenant que ça tourne mal, les citadins - les mêmes qui ont fui la misère des campagnes de leurs grands parents*, trop contents de travailler seulement cinq jours par semaine de bénéficier des congés payés et de se précipiter sur le cochon à un euro le kilo - virent moralisateurs : halte aux OGM, « pollueur-payeur » ! s'écrient-ils. Bien sûr. Ils cherchent à « manger bio ». Ils sont revenus sinon au champ du moins à un peu de raison. Mieux informée des conséquences de ses exigences de surconsommation à bas prix la population va peut-être réagir.
 

Une complicité confortable

Les algues vertes illustrent bien cette pollution, conséquence d'une complicité généralisée :
- manger pas cher (les consommateurs),
- produire plus facile (les agriculteurs) ,
- ne pas se préoccuper de l'environnement (tous),
- laisser faire (l'État).
Pourtant depuis 30 ans certains s'agitent, dans une indifférence presque générale, voir http://www.cotesdarmorenv.org/urgencemareesvertes/?page_id=120
Ironie du sort les algues apparaissent en été, et perturbent les vacances d'une population qui à cette époque de l'année utilise la nature comme terrain de jeu.

Depuis quelques années, il semble urgent d'agir. Les plaintes se multiplient.
Le Monde du 7 décembre rappelle dans un article relatant un nouveau dépôt de plainte que « Le tribunal administratif de Rennes, en 2007, et la cour administrative d'appel de Nantes, en 2009, avaient déjà jugé "que les algues vertes proviennent d'une politique de laisser-faire" et que "les représentants de l'Etat sont les responsables de cette situation", a rappelé l'avocat. "Dès lors que la responsabilité de l'État a été stigmatisée par des juridictions administratives, les représentants de l'État doivent répondre de ces infractions devant les tribunaux correctionnels", a-t-il argumenté. »
http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/12/07/algues-vertes-plainte-contre-le-prefet-apres-l-hecatombe-de-sangliers_1614438_3244.html

Le PLAV 

En Février 2010 le ministre de l'agriculture et la secrétaire d'État à l'écologie annonçaient un plan de lutte contre les algues vertes. Ce plan sera appliqué sur 8 baies dites « algues vertes » du bassin Loire-Bretagne. Ces baies reçoivent les eaux de plusieurs rivières et cours d'eau. 23 bassins versants soit plus de 3.500 exploitations agricoles, 120.000 hectares de surface agricole et 240.000 habitants sont concernés par ce plan. Le budget total est 134 millions d'euros, dont 94 millions pour l'État (et les établissements publics),  les collectivités territoriales auront à financer le solde.
3 projets de plateformes de compostages sont validés, une quatrième est à l'étude et un budget conséquent pour le ramassage est rendu disponible. Mais il faut aussi s'attaquer à la « source ». Faire diminuer les « fuites » d'azote de 30 % en s'appuyant sur le volontarisme, l'état se réservant le droit «  d'imposer des mesures obligatoires ». En attendant, «il va  contrôler les flux d'azote en collectant les déclarations des exploitations et en contrôlant les plans de fertilisation. Les préfets sont chargés de faire respecter les seuils de pression azotés (210 kg d'azote à l'hectare) ». Plusieurs associations  se déclarent dubitatives dès l'annonce de ce plan ; manque de moyens, méthodes inappropriées, charges financières trop importantes pour les collectivités.

En juillet 2011 L'Anses , l'agence nationale de sécurité sanitaire missionnée dans le cadre du PLAV émettait des « recommandations » concernant le ramassage des algues. Il doit s'effectuer le plus tôt possible, par des moyens mécaniques, les personnels doivent être protégés autant que faire se peut et être munis de détecteurs d'hydrogène sulfuré (gaz émis lor de la fermentation des algues). Leur exposition sera consignée dans leur dossier médical. Les chantiers doivent être identifiés et le public doit être tenu à distance.
L'agence avoue aussi que « l'expertise collective menée par l'Anses a été limitée par des connaissances encore lacunaires dans certains domaines ». Elle recommande « l'acquisition de connaissances complémentaires qui permettront notamment de mieux caractériser les émissions de gaz par les algues vertes et leur évolution au cours du temps, et de mieux appréhender les expositions et la toxicité des différentes substances émises ».Voir http://www.anses.fr

L'Europe somme la France de s'expliquer

Le 18 juillet 2011 , un document de 13 pages comportant soixante questions très précises à propos de la lutte contre les marées vertes est envoyé à la France. Un document que «l'État s'est bien gardé de le diffuser !», déplore l'association Eau & Rivières de Bretagne qui juge «parfaitement légitimes» les questions posées par L'Union européenne.
La Commission souhaite «obtenir un état des lieux actualisé et exhaustif de l'ensemble des mesures règlementaires, administratives et financières mises en œuvre pour prévenir et réduire les échouages d'algues vertes», rapporte l'association, précisant que l'exécutif européen« veut vérifier si les marées vertes constituent une violation de la directive nitrates (1991) et de la directive cadre sur l'eau (2000) et si toutes les mesures sont prises pour mettre fin à cette pollution».voir http://www.actu-environnement.com/ae/news/europe-marees-vertes-nitrates-13745.php4
et elle interroge précisément la France sur son « Plav ».
Les autorités françaises avaient fait savoir qu'elles « répondraient point par point ». Mais elles refusent de rendre public le document qu'elles ont remis depuis.
Aussi Europe Écologie les Verts demande au gouvernement de diffuser ce document dans une lettre ouverte (à l'initiative de sandrine bélier cosignée par José Bové, Yannick Jadot et Nicole Kiil-Nielsen ) adressée à Bruno Le Maire, Ministre de l’Agriculture, et Nathalie Kosciusko-Morizet, Ministre de l’Ecologie,
« La décision de la France de ne pas rendre publique sa réponse est injustifiable. La situation continue à empirer chaque année. Cet été ce sont 11 % d’algues en plus qui ont été ramassées par rapport à 2010 et leurs conséquences sur la santé ont rarement été aussi flagrantes qu’aujourd’hui, notamment après la mort de 36 sangliers cet été dans l’estuaire du Gouessant. Au regard des impacts sociaux, environnementaux et sanitaires liés à la prolifération des algues vertes, la transparence complète sur ce dossier doit être assurée.»
 Voir http://eelv.fr/2011/12/16/marees-vertes-la-france-cache-sa-reponse-a-la-commission-europeenne/

Et pendant ce temps-là...

Nouveaux décrets « nitrates »
Après le décret d'octobre, (voir http://www.media-web.fr/pollution-le-decret-de-la-regression-24-36-449.html) celui du 21 Décembre 2011 limite les nitrates apportés. (http://eelv.fr/2011/12/16/marees-vertes-la-france-cache-sa-reponse-a-la-commission-europeenne/)
« Cadeau empoisonné »
disent les associations de préservation de l'environnement qui prônent un retour à l'élevage en herbages. « Ce décrèt va favoriser les élevages nourris au soja et maïs ».

L'ANSES  dit « oui »

L'agence nationale de la santé reconduit un avis favorable pour l'utilisation d'eau polluée à Pleven. http://www.actu-environnement.com/ae/news/eau-pollution-nitrates-Cotes-Armor-Anses-avis-14010.php4

Et les agriculteurs disent « non»
Dans une  lettre ouverte aux paysans du Finistère, les organisations agricoles  font un point. Elles rappellent qu'avant la fin 2011 les plans locaux qui concerne les 5 baies du département  concernées par le PLAV doivent être déposés ; et que « les représentants des agriculteurs et de leurs structures ééconomiques se sont ainsi investis, depuis un an, dans les groupes de travail mis en place afin d’élaborer un programme d’actions ».
Mais le 25 octobre 2011, l’ensemble des organisations professionnelles agricoles, réunies lors d’un Conseil de l’Agriculture Finistérienne, a pris une position commune. Il indique que « Le chemin qui a été choisi pour endiguer le phénomène des marées vertes n’est pas le bon, et nous avons le devoir d’alerter l’ensemble des agriculteurs avant qu’il ne soit trop tard, car l’enjeu dépasse les seuls bassins versants algues vertes »
.
Il rappelle que les questions préalables posées au Préfet de Région ; Elles n'ont pas obtenu de réponse. Il indique que « Tant que l’État, la Région et les collectivitéśs territoriales n’auront pas pris d’engagements forts sur ces points, nous refuserons de poursuivre la mise en œuvre du plan de lutte contre les algues vertes dans le Finistère ». (voirhttp://www.fdsea29.fr/sites/d29/dostrans/)
Si les agriculteurs ne veulent pas coopérer, les mesures coercitives, annoncées dans le PLAV suffiront-elles ?

Vers la fin du temps des secrets ?

Cette fois il va bien falloir que l'État réagisse en répondant à l'Europe, à la population, mais aussi aux agriculteurs. Il ne pourra pas garder le silence et les laisser seuls trouver une solution à ce problème. Certes les agriculteurs polluent, on le sait depuis des années, mais qui les a laissé faire ? Qui les a encouragés ? Qui même, les a quelquefois contraints au prix de la survie de leurs « exploitations » ? Les consommateurs, les banques, l'État ?
Qui osera dire « nous ne savions pas » ?

La première des réponses des autorités françaises pourrait être la transparence. À quelques mois des élections présidentielles ceux qui accepteraient d'entrer sérieusement dans ce débat et proposeraient des solutions pratiques ne feraient pas que…des ronds dans l'eau.

sur le sujet : ceva.fr

*la Montagne Jean Ferrat 1964

29/12/2011 | 0 commentaire
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